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Châtel-St-Denis

Humaniser la filière du cacao

Fabien Coutel, lors d’une de ses visites à Madagascar chez Odile Zara. DR

ENTREPRISE

La société de chocolat Treegether fête ses deux ans. L’occasion de revenir avec son fondateur Fabien Coutel sur l’évolution de son système de parrainage de cacaoyer.

Fabien Coutel travaille depuis plus de vingt ans dans le secteur du chocolat. L’ingénieur en agroalimentaire, sensible au développement durable, rencontrait régulièrement des producteurs de fèves de cacao sur le terrain et déplorait leur anonymat dans la chaîne de production. Touché par ces travailleurs de l’ombre, il a imaginé durant de nombreuses années une parade, concrétisée il y a deux ans sous le nom de Treegether (Le Messager du 9 octobre 2020).

L’entreprise de chocolat qui fonctionne via le système de parrainage est établie dans la zone industrielle de la Crêta, à Châtel-St-Denis, où l’entreprise Cocoasource héberge son ancien employé devenu entrepreneur. «Treegether souhaite provoquer la rencontre entre les consommateurs de chocolat et les producteurs à travers le parrainage d’un cacaoyer. Je peux dire, en toute humilité, qu’il s’agit là du chocolat le plus traçable au monde!» explique son fon-dateur.

Parrainage et traçabilité au cœur du projet

Pour l’heure, Fabien Coutel fait venir quinze à vingt sacs de soixante kilos à la fois de chez ses producteurs, basés en Afrique et en Amérique latine. Sur le site de la société, les amateurs de chocolat peuvent faire connaissance avec eux (voir encadré) avant de choisir de parrainer un cacaoyer pour 130 francs par année. En retour, Fabien Coutel leur livre deux fois six plaques de chocolat issu de la plantation. «C’est gagné quand un parrain me dit avoir pensé à Joseph en faisant une mousse au chocolat ou lorsque les producteurs découvrent leurs noms sur l’emballage des plaques que je leur apporte.»

Le packaging et le graphisme sont assurés par des entreprises locales. La fabrication du chocolat est confiée aux bons soins de Bruno Buletti, un artisan tessinois reconnu. Si Fabien Coutel cherche la rencontre avant tout, il ne lésine pas sur la qualité de son produit.

Lui-même juré dans des compétitions de cacaos de renom, il soigne son rendu et s’enorgueillit de ne produire qu’en circuit court. «Ainsi, en produisant à petite échelle et avec peu de stock, j’assure une fraicheur ma x ima le.» Les plaques Treegether sont également disponibles sur la boutique en ligne permettant à de futurs adhérents de goûter avant de s’engager, ou aux quelque mille parrains et marraines de renflouer leurs stocks. L’épicerie fine Papiy, partenaire depuis le début de l’aventure, propose également un assortiment.

Le Français d’origine commence à étendre son activité aux professionnels. «Il faut savoir que la très grande majorité des chocolatiers ne fabriquent pas leur chocolat mais le commande, puis le transforme», souligne Fabien Coutel. Treegether surfe toutefois sur la tendance du «bean to bar», de la fève à la plaque, en proposant le cacao de ses producteurs à des confiseurs de plus en plus nombreux: Moutarlier à Noville, la chocolaterie de Gruyères, Jean-Paul Raffin à Martigny et Pascal Kropf, d’Onde de Choc, à Echallens. L’expert lorgne aussi du côté des chefs étoilés pour figurer sur leurs cartes et un premier menu avec le nom d’un producteur Treegether est annoncé pour les semaines à venir.

La garantie du juste prix et projets de développement

Que ce soit pour la production de Treegether ou pour les chocolatiers, Fabien Coutel paie le même prix d’achat du cacao, en moyenne 40% supérieur au prix du marché. Une part du budget du parrainage est également dévolue au développement. «Ce sont de petites choses mais qui font vraiment la différence, au niveau de la communauté également», note l’entrepreneur. Ainsi des panneaux solaires et des éclairages publics ont été installés, et une moto et un zébu ont été alloués à deux producteurs pour leurs déplacements.

«Quand on connaît les gens, on ne peut pas agir comme quand on ne les connaît pas.»

Treegether n’est pas officiellement labellisé fairtrade, mais le prix payé aux producteurs est supérieur aux minimas exigés par le label. «J’estime en outre que nous donnons assez d’informations via notre site internet et les newsletters sur ce que nous réalisons», assure l’habitant des Paccots. De même, Fabien Coutel parle de bio par défaut, les petits producteurs ne pouvant que difficilement se procurer des engrais. «Même exempts de produits phytosanitaires, nos fèves ne pourraient être certifiées bio, transitant dans des containers mixtes.»

Pour autant, l’enfant d’artisans traiteurs connaît la valeur des denrées alimentaires et le travail en amont pour des produits d ’exception. Il vient de recevoir de la vanille qu’un de ses amis cultive en Nouvelle-Calédonie et la propose déjà à ses clients. Ouvert sur le monde, et après la visite récente de ses productrices à Madagascar et au Pérou, l’expert en cacao représentera Treegether au Salon du chocolat à Paris et au Salon des goûts et terroirs à Bulle au début du mois de décembre.

Régine Gapany


Les cinq producteurs de Treegether

Depuis son lancement il y a deux ans, Treegether a accueilli une nouvelle productrice dans son équipe. Ainsi aujourd’hui la société travaille en direct avec cinq producteurs, trois femmes et deux hommes. Il s’agit de Suzanne Jaolaza et Odile Zara à Madagascar, Edelmira Quiroz Ponce au Pérou, Joseph Kiwanuka en Ouganda et Ambroise N’Koh en Côte-d’Ivoire. «Ce dernier, très médiatisé dans son pays, avait reçu un prix d’excellence pour son cacao, que je lui avais remis, en 2019, à Paris», se souvient le fondateur de Treegether Fabien Coutel. La plantation du producteur ivoirien embauche quelques employés. Joseph en Ouganda travaille avec son épouse et parfois ses parents. «Je vais le rencontrer prochainement avec une surprise, une moto pour faciliter ses déplacements», se réjouit Fabien Coutel. A Madagascar, Suzanne cultive les fèves avec son époux, et Odile avec ses deux fils. «J’ai rencontré Edelmira pour la première fois en juillet dernier avec ses parents. Les panneaux solaires venaient d’être installés dans sa petite cabane dans la jungle.» La diversité dans les terroirs assure un goût particulier à chaque tablette, malgré une recette similaire. RG

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