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Châtel-St-Denis

Le Sirius régale les cinéphiles depuis vingt ans dans une salle obscure rénovée


CINÉMA SIRIUS CHÂTEL-ST-DENIS

En 1997, le cinéma Sirius ferme les portes de sa salle obscure. Le but? Rénover ses installations jugées «ancestrales». Le cinéma rouvrira en 1999: sa gestion est alors confiée à un groupe de jeunes. Vingt ans plus tard, les héritiers de cet héritage Marie Chevalley, 20 ans, et Maël Eschmann, 18 ans, se sont plongés dans les archives du Sirius pour retracer son histoire et rassembler le témoignage des «anciens».

Marie Chevalley, 20 ans, et Maël Eschmann, 18 ans, sont intarissables sur l’histoire du cinéma Sirius, à Châtel-St-Denis. Ils ne sont pourtant pas historiens: elle étudie la pédagogie, lui est collégien. Il faut dire qu’ils se sont plongés au cours des derniers mois dans les cartons d’archives pour retracer l’histoire de «leur» salle obscure, avec quelques-uns de leurs compères (voir Le Messager du 19 juillet dernier).

Leur démarche de «recherchistes» coïncide avec les vingt ans de la rénovation du «plus grand des petits cinémas», comme il aime se décrire. Leurs trouvailles sont rassemblées dans une exposition, à voir demain et dimanche au cinéma. Un véritable «jeu de piste» pour la Châteloise, membre depuis cinq ans de l’association qui gère le cinéma, et le Grangeois qui en fait partie depuis trois ans.

Les deux compères ont donc épluché les archives communales de Châtel-St-Denis et les titres de presse fribourgeois: Le Messager, La Gruyère ou encore La Liberté. «Nous avons d’abord réfléchi à où pouvaient être conservés les documents», décrit le jeune homme qui s’occupe habituellement des projections. Tous les documents ont été copiés pour garder un exemplaire au cinéma. Qui sait dans vingt ans, d’autres se lanceront peut-être dans la même entreprise. «J’espère que dans vingt ans, c’est nous qu’on viendra trouver pour se retourner sur l’histoire du Sirius», déclare en souriant Marie Chevalley. Par contre, Marie Chevalley et Maël Eschmann témoignent de leur légère «frustration» quant au mince résultat de leurs recherches. «Pour l’extérieur du bâtiment, les photos sont peu nombreuses. Mais concernant l’intérieur, elles sont quasiment inexistantes.» L’étudiant l’explique par le fait que, à l’époque, prendre des photos était moins courant qu’aujourd’hui et, surtout, coûtait beaucoup plus cher. Les seules images de l’intérieur de la bâtisse qu’ils ont obtenues proviennent de l’émission Journal romand sur la TSR, qui date de 1986. «On y voit l’importance qu’avait déjà le cinéma pour les Châtelois», estime la jeune femme.

Entre 7e art, gym et théâtre

L’écrivaine Marie-Claire Dewarrat, qui s’est longtemps occupée du cinéma Sirius, a été une mine d’informations pour le duo. «Tous ses documents étaient soigneusement rangés dans des classeurs», se souvient Maël Eschmann. Et sa collègue de raconter: «Nous avons pu voir ses plannings de l’époque. Elle y avait noté quand elle devait préparer les lumières. Le cinéma accueillait en effet du théâtre, des soirées de gym…»

Dans leurs recherches, ils ont découvert que la rénovation du cinéma était impérative. «L’équipe considérait qu’il n’était plus possible d’exploiter le cinéma dans de telles conditions. En 1992, un article évoque déjà des installations ancestrales, raconte Marie Chevalley, qui gère le bar et la caisse du Sirius. Il faut dire que le cinéma n’avait plus été rénové depuis 1956.»

Dans les années 1970, le cinéma est racheté par la commune de Châtel-St-Denis à la paroisse. Rose-Marie Ducrot, ex-syndique, prend le dossier en main. «Elle a réuni des jeunes dans une commission qui deviendra en quelque sorte la commission culturelle de la ville pour exploiter le cinéma.» En mai 1997, la salle obscure ferme ses portes.

Bernard Pache, qui avait repris le flambeau de l’auteure Marie-Claire Dewarrat, propose alors avec son projet Atelier-studio de consacrer la Maison des œuvres au théâtre et de construire un cinéma ailleurs dans la ville. «Les Châtelois ont eu peur de perdre leur salle obscure», raconte Maël Eschmann. Finalement, une enveloppe de 550 000 francs est accordée. Le Grangeois estime, à titre personnel, que cet événement est le plus marquant de l’histoire du cinéma, avec le passage au numérique en 2011.

Toujours des jeunes aux commandes

En septembre 1999, sous l’impulsion de Bernard Pache, qui avait repris le flambeau de l’écrivaine Marie-Claire Dewarrat, un groupe d’une quinzaine de cinéphiles s’était constitué. «C’est ce qui, finalement, perdure aujourd’hui, même si nous avons pris depuis le titre d’association», souligne-t-elle. Marie Chevalley est admirative: «J’ai pris conscience qu’à plusieurs périodes de son histoire, le cinéma aurait pu disparaître. Sans l’engagement et l’abnégation d’une poignée de personnes, il ne serait plus là.»

C’est aussi grâce à ce dévouement que naîtra le festival de super-8 Tourné-Monté, qui vivra trois éditons entre 2006 et 2008 ou encore les Nuits d’Halloween qui sont devenues l’un des événements phares du Sirius. Et le succès de la seule salle obscure châteloise est toujours au rendez-vous, la fréquentation est même en augmentation. Elle a atteint les 10 000 spectateurs en 2016. Depuis, elle connaît une «légère rechute», une tendance qui s’observe dans tous les cinémas suisses.

Première projection en 1921

Si la première projection dans la salle de la Maison des œuvres date de 1921, les premiers films sont présentés à la population, dès 1903, sous un chapiteau lors de la Bénichon de Châtel-St-Denis. «En 1921, le premier projecteur arrive. L’abbé Ficher en avait importé un depuis l’Allemagne.» A l’unisson, les deux jeunes veveysans dé- clarent que la «convivialité» demeure la force du Sirius.

«L’association est ancrée dans la ville, estime Marie Chevalley. Les gens ne viennent pas seulement pour voir des films, mais aussi pour discuter avec nous. On finit même par se sentir à la maison.» En plus de l’exposition, l’un des derniers cinémas indépendants de Suisse romande proposera, pour fêter les vingt ans de sa rénovation, deux avant-premières avec Rambo: last blood (demain à 20 h 45) et Le dindon (dimanche à 17 h).
Valentin Jordil

Le cinéma Sirius célèbre les 20 ans de sa rénovation avec une exposition, à voir demain et dimanche, à la Maison des œuvres et deux avant-premières: Rambo: last blood (demain à 20 h 45) et Le dindon (dimanche à 17 h)

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