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Culture

Le nouveau cap de Venise et les rêves de l’international

Joël Dewarrat pose dans son atelier, à Bulle: dans les peintures réalisées par le Châtelois se retrouvent toujours des formes humaines. LE MESSAGER

ART CHÂTEL-ST-DENIS

L’artiste châtelois Joël Dewarrat, alias Jod, a été repéré par un groupe international encourageant l’art émergent. A Venise, l’amateur d’art performatif a proposé sa vision de la peinture, dont la base vient de la matière.

L’atelier dans lequel travaille Joël Dewarrat, à Bulle, respire l’art: avec du matériel éparpillé, des essais d ’assemblages, des œuvres en cours et un énorme bonhomme fait de cartons qui repose sur l’escalier. Du café cuit en permanence tandis que monte aux narines une odeur de peinture mêlée à la fumée issue du fourneau, unique source de chaleur.

Nul besoin d’observer longuement les œuvres de Joël Dewarrat, alias Jod, pour saisir le centre d’intérêt artistique du Châtelois de 49 ans: partout, des formes humaines. «Tous mes travaux ont u n r ap p or t ave c l ’ hu m a i n , confirme-t-il. Le questionnement autour duquel je m’emploie tourne autour de cette phrase: “Qu’est-ce que l’homme compte-t-il faire de l’homme?” L’idée est d’interroger la forme humaine entre la chaire et la mécanique.»

L’artiste veveysan a eu le temps et l’occasion de rouler sa bosse, depuis 1997 et sa formation achevée à l’Ecole des arts appliqués, à Vevey. Au fil des années, il s’est spécialisé dans l’art performatif en développant une manière de faire propre.

Débuts en BD

Tout jeune, le fils de l’écrivaine châteloise Marie-Claire Dewarrat se lance dans l’illustratif et la bande-dessinée, remportant ici et là des concours destinés aux adolescents. Il s’oriente plus tard vers la peinture et rapidement, il expose ses œuvres avec des collectifs d’artistes. «J’ai toujours eu des activités professionnelles en tant que graphiste, décorateur ou dans l’événementiel, mais je tenais à exposer au moins une fois par année.»

En 2005, il crée le collectif Born to Be, qui produit des performances hybrides mariant le son et la vidéo à la narration du dessin. «En tant qu’artiste plasticien, on a tendance à proposer un objet fini, sans rapport direct avec le public. J’avais cette envie de partager le processus de création avec les spectateurs.» Au delà de sa volonté de se produire en direct, Joël Dewarrat souhaite lier les arts. «L’idée consiste à proposer des créations globales et interdisciplinaires. Chacun apporte sa patte avec une certaine improvisation. La base de la performance est écrite, afin d’avoir un cadre, mais nous la produisons dans un esprit de spontanéité.»

Souvent, la prestation musicale influence son coup de pinceau, tandis que la forme que prend son tableau peut donner une certaine couleur à la musique. «Dans certains cas, le public lui-même peut se voir intégré à la performance», apprécie Joël Dewarrat. «Le temps n’est pas compté à la minute près, on aime éviter les contraintes en cherchant la fluidité et la liberté.»

Dans l’optique de traiter plus intensément cette manière de produire son art, Jod fonde Ruletka en 2011, un nouveau collectif qui élabore notamment une réflexion sur la consommation intitulée Snack, questionnant le spectateur «dans une expérience anthropophage symbolique». «Nous l’avons présentée lors d’une édition du LUFF (n.d.l.r.: Lausanne Underground Film Festival, en 2012).»

Tout autour de l’humain

C’est ensuite qu’arrive pour Jod une grande période de questionnement autour de l’humain. Par son art, il cherche des réponses personnelles, avec la volonté d’offrir un champ des possibles aux spectateurs.

«Chaque œuvre d ’art recense une question ouverte, que chacun peut interpréter à sa manière. Dans mon travail, je cherche avant tout à interroger, parfois en choquant.»

Ainsi, l’acte artistique prend des contours de proposition, d’ouverture et de dialogue. La peinture du Châtelois tend alors vers l’abstraction figurative autour de la forme humaine et «joue sur ce conf lit existentialiste à travers l’aléatoire de la matière et la narration de la ligne», indique une présentation dédiée au Veveysan sur un site d’art. En d’autres termes, il s’intéresse plus particulièrement à la réactivité de la matière. «Au lieu de créer des formes toute faites, je les recherche dans la réaction du support. Le papier a cette capacité de pouvoir travailler par lui-même.»

La technique développée par Jod consiste alors à chiffonner, frotter et trouver des contrastes du travail plastique du papier. «On trouve alors des traits évoquant des personnalités, des situations. L’idée consiste à aller vers l’inconnu, que l’image vienne par elle-même par la réactivité de la matière.» Joël Dewarrat compare son activité à celle d’un archéologue, «qui travaille au pinceau afin de mettre en lumière les contrastes de la matière». L’exposition L’ homme de papier, en 2017, aura été la parfaite illustration de cette technique.

La porte vers l’international

Récemment, le Châtelois a gravi encore un échelon dans sa carrière, puisqu’il a été invité à exposer ses œuvres à Venise, il y a quelques semaines. Contacté par Itsliquid, «un groupe qui promeut l’art émergeant international», il se dit «très flatté» et savoure: «Il s’agit d ’une plus-va lue énorme pour mon travail et surtout, cette participation m’ouvre les portes de l’international. Itsliquid opère comme une constellation, avec des points de chute dans de nombreux pays.»

Avant de saisir les futures occasions d ’exporter son art, Joël Dewarrat fait dans le local, avec une exposition à Bulle, pour encore quelques jours (lire ci-contre)Jonas Ruffieux

Exposition Yuukoku, au festival Altitudes, à Bulle, chemin des Crêts 10. Vendredi de 17 h à 20 h, samedi et dimanche de 11 h à 17 h.


De l’origami sauvage exposé au festival Altitudes

Depuis quelques années, Joël Dewarrat, alias Jod, fait partie d’un collectif nommé Anti-matière, qui se consacre notamment à l’art performatif. Il expose actuellement à La Distillerie, à Bulle, dans le cadre du festival Altitudes, jusqu’à dimanche. «Il y explore la forme humaine en trois dimensions avec des personnages façonnés dans des sacs en papier, proposant une version dérivée de l’origami», promet le site du festival, dont le thème général est “le crépuscule”, «à travers la culture manga», précise le Châtelois. «Pour ma part, j’ai travaillé le papier de façon sculpturale via une installation.» JR

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