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La semaine presque parfaite d’Alexis Monney

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SKI ALPIN FRUENCE/COURCHEVEL

Quelle expérience pour le skieur châtelois!

A 23 ans, il a arraché sa qualification pour la descente, épreuve reine des Mondiaux de Courchevel, dimanche dernier.

L’athlète de Fruence analyse image par image sa course, terminée au 18e rang final.

Le ton de sa voix ne masque pas sa déception, mais c’est comme si Alexis Monney ne s’autorisait pas totalement à être déçu, reconnaissant tout de même pour la semaine riche en émotions et en expérience qu’il a vécue aux Mondiaux, à Courchevel. Dimanche dernier, le skieur de Fruence a pris le départ de la course reine des Mondiaux, à Courchevel et davantage que son 18e rang, c’est le ski proposé sur cette descente qui lui laisse un arrière-goût un peu amer. «J’aurais pu mieux skier», lâche-t-il simplement, sans chercher d’excuse.

Il a fait trop chaud

Il pourrait pourtant évoquer cette longue interruption, trois dossards devant lui, nécessaire à l’évacuation en hélicoptère du malheureux Brodie Seger. «Mentalement, j’ai bien géré cette pause, mais c’est par rapport à la chaleur que c’était compliqué. Je transpirais en étant statique au départ, la tension de mon corps s’est ramollie pour la course. Et au final, je réalise un premier secteur assez moyen.» Avant de monter en puissance au fil des hectomètres et de terminer à 1’’75 de l’intouchable vainqueur, le Nidwaldien Marco Odermatt. De retour à la maison, Alexis Monney a décidé de faire l’impasse sur les courses de Coupe d’Europe de Garmisch cette semaine, afin de récupérer au mieux avant les prochaines épreuves de Coupe du monde, qui auront lieu à Aspen, aux Etats-Unis, au début du mois de mars. Il a également pris le temps de revenir, pour Le Messager, sur les différents points clés de sa prestation.


Pour la première fois de sa jeune carrière, le Veveysan figure parmi les 30 premiers au départ. «Avant de m’élancer, je me sentais bien mentalement, mais physiquement, pas au top, à cause de la chaleur. En général, une minute avant le départ, je me répète des petites phrases sur les détails que je dois améliorer.» Puis il s’élance, pousse deux fois: «Je trouve que je suis bien sorti du portillon et que mon passage jusqu’au premier saut était bon, étant donné que je suis davantage un technicien qu’un glisseur.»


Alexis Monney et ses entraîneurs le savent: le Veveysan

doit encore améliorer sa technique sur les sauts. Les suiveurs du Châtelois ont encore en tête son envolée sur la Tête de chien, à Wengen. Comme sur le Lauberhorn, en moins extrême toutefois, ses genoux partent quelque peu de travers. «Il y a un virage juste avant et je ne suis pas parvenu à poser les skis suffisamment à plat avant le saut du Zenith, ce qui engendre cette position de côté. C’est un aspect que je dois travailler, mais ça ne se corrige pas en pleine saison, on s’y attèlera cet été. Dans les airs, d’ailleurs, je me sens assez bien, ce n’est pas quelque chose qui me fait peur.»


Si la descente de Courchevel a été nommée l’Eclipse, c’est en référence aux nombreux changements de luminosité qui s’enchaînent tout au long du parcours. Le Valaisan Justin Murisier comparait l’entrée dans l’ombre à l’extinction éclair des feux d’une voiture, de nuit. «J’ai opté pour des verres assez clairs, prévus pour des conditions de brouillard, du coup ça ne m’a pas posé trop de problèmes. Sur cette photo, on est dans le troisième secteur, où j’ai franchement bien skié, mais où j’ai payé la vitesse que j’avais perdue entre le 1er et le 2e intermédiaire. Cette vitesse trop basse s’est répercutée sur quelques dizaines de secondes de course, malheureusement.»


4 Si Marco Odermatt a brillé sur l’Eclipse, c’est grâce à ses qualités techniques, qu’il a pu exploiter sur cette piste exigeante, avec de nombreuses courbes. «Marco a cette faculté à tendre les lignes, à faire moins de chemin que tout le monde», admire Alexis Monney, qui s’est lui aussi montré à son affaire dans tout le secteur du Mur des Braves. «Ce virage-ci n’est pas le plus difficile, mais il est très long. A l’entraînement, il donnait l’impression de pouvoir être beaucoup plus direct et au fil des jours, ça a commencé à taper à la sortie. Il fallait donc absolument garder de la hauteur pour le prendre de manière optimale. C’est un joli virage à skier, qu’on peut davantage construire vu sa longueur. On a moins besoin de mettre toute sa force d’un coup sur le ski extérieur.»


Les images à la télévision, souvent, «écrasent» la pente réelle. Difficile derrière son petit écran de se représenter l’inclinaison à laquelle font face les skieurs de Coupe du monde. La piste de Courchevel présente par exemple une pente moyenne de 30%, soit 3% de plus que la vertigineuse Streif de Kitzbühel! «Ici, c’est vraiment raide. Ma maman m’a dit avoir été très impressionnée par la pente du dernier mur. Ce virage est vraiment difficile à appréhender, il faut absolument arriver dans le bon timing. Trop tôt, cela devient impossible de tailler la courbe et on se fait «descendre», un peu comme l’a fait Justin Murisier. Trop tard, on se retrouve trop loin de la porte et il n’est plus possible de revenir.» Cette nouvelle piste, voulue légendaire par ses créateurs, vaut-elle une «mythique» comme Wengen ou Kitzbühel? «Oui, certainement. Peut-être qu’on donne aussi beaucoup d’importance du fait que ce sont des Mondiaux. C’était une très jolie descente qui, je pense, a plu à la majorité des coureurs au départ.»


6 «Aïe, celle-ci, ce n’est pas une belle photo! On voit que mon pied est assez loin du corps et que ma position est trop en arrière. Ce n’est pas idéal, surtout sur cette neige assez agressive, car cela fait que le ski freine au lieu d’aller vers l’avant. En soi, il doit me manquer trois centimètres de hauteur de bassin à l’entrée du virage pour que le ski prenne vraiment bien. Je n’ai pas réussi à maintenir une bonne stabilité du corps sur cette course, peut-être à cause de la chaleur, je ne sais pas.»


«A l’arrivée, j’étais essoufflé et déçu, je savais que je n’avais pas très bien skié. Je me dis que j’ai donné tout ce que j’avais, j’ai eu du plaisir en descendant et mon fan’s club était présent pour me soutenir, ma famille aussi, ça reste une belle journée. La gestion des nombreux paramètres n’a pas été facile, notamment le fait que les écarts entre les coureurs étaient plus longs que ce à quoi je suis habitué, plutôt dans les 2’20’’ alors qu’habituellement pour moi, hors du top 30, c’est 1’15’’. Ainsi, on est plus longtemps seul au départ, à attendre dans le portillon.»


Déjà, le tirage de langue d’Alexis Monney après avoir franchi la ligne d’arrivée semble légendaire. «Il me semble que je le fais surtout quand je ne suis pas trop satisfait de ma course! Mais le sourire est aussi là, pour les gens qui ont fait le déplacement à la dernière minute pour venir me voir, ça m’a vraiment fait plaisir. Je suis convaincu qu’on apprend davantage des déceptions que des victoires et ça va sûrement me servir pour la suite, pour des éventuels prochains championnats du monde. Je suis content et fier de ma semaine, car il y a eu beaucoup de paramètres à gérer et la fatigue à prendre en compte. Je crois ne pas m’en être trop mal sorti.»

Jonas Ruffieux

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