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«Louper joyeusement ensemble»

Sans scénario, sans décor et sans costume, le théâtre d’improvisation joue beaucoup sur l’imaginaire du public. RÉGINE GAPANY

THÉÂTRE D’IMPRO ATTALENS

L’association De Cour à jardin propose des ateliers d’improvisation théâtrale le mardi de 19 h 45 à 21 h 45 à Attalens. Une exclusivité dans le district, alors que la pratique fleurit dans les régions alentour, notamment dans le canton de Vaud où elle est souvent enseignée dans les écoles.

«5,4,3,2,1, impro!», lance Anna Krenger, la professeure, comédienne, improvisatrice et animatrice de la soirée. Une grande énergie, l’envie de rire et beaucoup de bienveillance émanent de l’habitante de Montreux, formée notamment à l’école des Teintureries et qui monte chaque mardi à Attalens pour le cours d’improvisation théâtrale.

«Les participants recherchent une activité ludique. Je suis là pour faire vivre le groupe, mais aussi pour leur apporter des outils pour jouer sur scène, et dans la vie», note la jeune femme.

L’association De Cour à jardin, qui propose ces ateliers d’impro, a vu le jour en 2009 sous l’impulsion de sa présidente, Vanessa Lopez. A la base, il s’agissait de «créer un groupe théâtral pour les enfants de la Veveyse et de la région d’Oron». Depuis, des ateliers pour toute la famille, pour les adolescents de 12 à 18 ans et pour les adultes souhaitant découvrir et s’entraîner à l’improvisation (depuis 2016) sont venus compléter l’offre.

Forme ludique de développement personnel en groupe

Ce mardi-là, ils sont six à se rendre dans les anciens ateliers de couture à Attalens. Candice, Mathilde, Valérie, Arnaud, Michele et Nicolas. Ce dernier assiste à sa deuxième séance. «Je suis informaticien, j’ai plutôt l’habitude de parler à mon ordinateur, plaisante-t-il pince-sans-rire. Je suis cependant de plus en plus souvent amené à traiter avec des équipes dans le cadre de mon travail, alors que, à la base, je n’aime pas causer.»

Les amateurs d’impro, en plus de passer un bon moment, viennent développer des aptitudes humaines et sociales qui peuvent les aider dans le quotidien. La liste des qualités inhérentes à cette forme d’expression est long ue: bienveillance, écoute, non-jugement de soi et des autres, réaction, vivacité et lâcher prise…

«Il s’agit d ’accepter d’aller où l’on ne veut pas forcément aller. C’est le groupe qui cherche, qui avance et gère l’échec. On est là pour se louper joyeusement ensemble», souligne Anna Krenger. La coach les fait sortir de leur zone de confort. «Mais je ne force jamais à faire un exercice.»

Ainsi, sur scène en présence d’un public, toute l’équipe évitera de faire chanter Candice, pour qui l’épreuve s’avère toujours délicate. «Moi, je préfère jouer la pouffe ou l’influenceuse.» Michele, lui, évolue dans l’absurde et joue avec les accents, Arnaud se délecte des jeux de mots et Valérie, qui a «grandi avec Coluche», se retrouve souvent dans la peau d’une personne âgée. Selon Mathilde, la seule à avoir fait du théâtre auparavant, connaître ses interlocuteurs demeure un atout indéniable. Si les deux disciplines évoluent en parallèle, l’impro demande plus de vivacité que le théâtre. «C’est toujours gai et vivant!»

Focus et «super tilts»

Malgré le côté spontané de l ’improvisation, les techniques n’en sont pas moins exigeantes pour rendre les interactions rythmées et emballer le public durant les matchs (voir encadré). Tous les participants sont cependant unanimes: «On ne peut pas faire faux.» Durant les cours, différentes méthodes sont présentées et pratiquées à froid. Ou presque. Une première demi-heure d’échauffement consiste en des exercices de gestuelle et de réflexe, pour faire le lien également. A la suite de quoi, ils se retrouvent, souvent par groupes de deux, à improviser durant quelques minutes à partir de mots clés ayant trait à différentes situations, relations, lieux, profession, etc. «Un fast-food, un débarcadère, ça vous inspire?»

Anna Krenger, chronomètre en main, veille au grain et encourage les courageux qui se sont lancés. «Je vous laisse cinq secondes.» Au rythme des différentes situations et dans une ambiance joyeuse et bon enfant, elle leur apprend à «tirer le fil des situations et des personnages». «Ici, tous les niveaux sont mélangés, le but est de pratiquer ensemble, sans compétition.»

Il y a quelques semaines, le groupe a mis l’accent sur les «super tilts», une technique qui vise à réagir sur un élément et à s’y engouffrer. Ce soir-là au contraire, ils apprennent à ralentir en focalisant sur un élément extérieur ou en introspection, ce qui permet de s’autoalimenter afin de trouver autre chose quand une situation stagne. «Il faut se faire confiance pour assumer les conséquences de créer un focus», admet la professeure.

Cette semaine, les amateurs d’impro ont reçu une intervenante québécoise. Et le week-end du 17 et 18 décembre est déjà sur toutes les lèvres, l’association se produisant avec ses troupes à l’occasion du marché de Noël d’Attalens, notamment le dimanche à 15 h. «Nous essayons de monter sur scène chaque année avec un spectacle», relate la présidente Vanessa Lopez. Régine Gapany

www.decourajardin.jimdofree.com


De la patinoire aux planches de théâtre

«L’improvisation est issue du théâtre et aurait réellement pris naissance à Rome au IIIe siècle av J.-C. avec la comédie Atellane, avant de s’étendre en France grâce à la commedia dell’arte au XVIe siècle», peut-on lire sur le site des associations relatives.

Mais c’est au Canada que les matchs d’impro tels que nous les connaissons aujourd’hui sont nés dans les années 1970. Robert Gravel et Yvon Leduc ont repris les codes du hockey sur glace pour les adapter à des joutes théâtrales entre deux équipes. «Un match se compose d’une dizaine de parties d’environ dix minutes chacune sur un thème choisi par l’arbitre», détaillent les participants du cours d’impro d’Attalens.

Par la suite, d’autres formats ont été inventés comme le catch d’Impro, le cabaret d’impro, l’impro western ou musicale, et maintenant même parfois «une heure et demie non-stop sur un concept prédéfini». RG

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